Catégorie : A quoi je rime

Aylan

Quand plus aucune raison
Ne permet de rester,
Faut-il fuir de sa maison
Pour une terre libérée ?
Nier, refuser de se battre :
Est-ce, différemment, combattre ?
Qui sommes-nous pour juger
Quand la violence est telle ?
Aucune résistance n’est réalisable ?
« On » s’embarque aux flots de sel
« L’un » risque la mort, sur le sable…
Me vient comme un dégoût.
Me vient comme une haine.
Voulait-il venir vers nous ?…
Ses parents pensaient bien,
Ses passeurs ne pansent rien.
Il meurt, noyé, dans la peine,
Il s’accoste au rivage noir
De nos peurs européennes,
Ballotté d’un mince espoir
Celui d’une marée humaine
Qui l’emporte et l’emmène
Loin du quotidien intolérable
Loin d’un destin inacceptable…
Résultat. Macabre rivage…
La désolation sur la plage
accueille un ange migrant
Qui jamais ne sera grand.
D’avoir voulu se réfugier
en gagnant un statut d’humain,
Il ne récolte rien. Rien, putain !
A part un cliché morbide
que nous allons tous twitter,
ouverts au destin des apatrides
pas à celui des guerriers.
Oh. Nooon. Face à terre, tombé !
A peine haut de trois années,
Il s’échoue. Nous échouons.
Au tsunami qui déferle sur mon cœur
Aylan, mon pauvre Aylan, je te pleure
Sans même savoir qui tu es.
Parce que je ne sais plus moi-même
A quoi sert que l’on t’aime
Maintenant que ta photo seule
Me percute durement la gueule.
Toi qui rêvait de revivre ici
sans que moi je l’ai choisi…
Tu meurs. Tu meurs et moi je vis.
Mon continent n’est pas assez riche
Il ne s’est même pas dit : « chiche
Aylan vient compléter nos rangs ;
Grâce à lui, soyons plus tolérants ».
Non, mon continent se plaint.
Il travaille à ce que la paix demeure
et craint la violence par contagion.
Mon continent contemple le tien
en lui vendant très cher des armes
en lui envoyant ses chars et sa légion
en essayant d’essuyer vos larmes…
Dérisoires aides au milieu de l’enfer
D’éveiller les consciences à bien faire !
Mais que pouvons-nous faire ?
Poursuivre la guerre à la guerre ?
Comment comprendre d’où vient
ce foyer de misère, ce culte du mal
qui sert de socle à l’acte immoral
Qui engendre des tortionnaires
en lieu et place des professeurs ?
Il reste coi, béat de consternation
face à la violence des heurts
de ton régime qui n’a rien de tutélaire
et qui nous parle à coup de canons.
Il n’est pas insensible mais il a peur.
Il a, vif de dédain, cette divine intuition
que le divin ne répond plus à sa mission.
Il se cherche des excuses, il travaille
Il zyeute la bourse, sourd à tes « aïe »,
délègue des émissaires, des représentants ;
mais rien n’y fait. Ton pays sanglant
se bat pour une cause qui n’est pas
celle de tous ceux qui t’ont fermé les bras.
Le sens de la vie ne se partage-t-il pas ?
Quel message nous envoie ta disparition ?
Faut-il céder ? Davantage enseigner ?
Brûler les évangiles ? Anéantir la civilisation ?
Effacer la notion de pays ou de territoire ?
Abattre les frontières au lieu des repoussoirs ?
Inventer un monde sans intérêts divergents
Où le sans-papier s’applique à tous les gens ?
Pousser l’utopie un peu niaise jusqu’à croire
au cycle vertueux d’un monde sans histoires ?
Face aux conflits, « l’inaction » internationale
résulte-t-elle d’un manque aigu de morale ?
Les YakaFoKon sont-ils les seuls vrais cons ?
Je me désole de cette imposante dichotomie.
Je m’inquiète d’un deuxième big bang.
La guerre n’a jamais été autant le yang
d’un yin pétri de liberté que personne défend.
Et c’est triste d’être citoyen de l’ignominie
avec la conscience que ton choix est dicté
par la force d’un contraire qui veut t’éradiquer.
Parce que ton plaisir est la triste somme
Des hasards qui manquent aux hommes
N’ayant pas eu la chance d’être bien nés
Il reste fade, quand il est vide de sa moitié.
Le bonheur est pourtant la seule chose
Qui se multiplie quand on le divise.
Si le monde uni où rien ne s’oppose
me semble n’être qu’une notion rose,
Pourquoi n’existe-t-il pas de devise
où l’intelligence suprême s’impose ?
Qui s’amuse à déséquilibrer la balance ?
Quel rempart ultime à la déchéance ?
Une fois encore, pas de réponse !!!!
Si quelqu’un sait, qui se dénonce
ou, bravement, nous l’annonce
car plus ça va, plus le monde s’enfonce…
Ne reste bientôt plus, d’humanité, une once.

 

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