Corse, écorce
Qu’est-ce une vie de douleurs et d’injustices
Rongée par tant de tenaces blessures
Lorsqu’en chemin des croix mettent au supplice
Et aucune église dans laquelle être sûre ?…
Le socle d’amour, au matin de ma Vie
A bâti ses murs au soleil de ma Provence
Et jette les souvenirs dont on n’a plus envie
A la lisière des lentisques, aux agaves de jouvence
Quelques jours, étape estivale, escale
Parenthèse fleurie, courte échelle
Merveilleux séjour démarré en fond de cale
Mon cœur serein ne bat plus de l’aile.
Opulente nature, préservée des extravagances
Tu m’as, soudain, de tes baies bleu cobalt,
Offert de douces et merveilleuses vacances
Une royale destination, une libératoire halte.
Reviendrai-je un été fouler ton sol sableux
Respirer par brassées tes parfums colorés ?
Puisse un jour décrocher le ciel bleu
Conquis naguère, amoureusement exploré…
Je te désigne plus belle Ile de Beauté
Tes hôtes, mes amis, ont, mes larmes, séché ;
Et cet air qu’ensemble nous avons respiré
Me sert d’oxygène à mon chagrin verbalisé.
Il fût plaisant et reposant, pendant cette semaine
D’observer, en embuscade, sur votre terrasse,
Les allers et venues des bateaux de Capitaines
Modèle d’aquarelle enchâssée dans ma nasse.
Prodigieuse contrée, mélodieuse nature,
D’avoir fait la pari des jardins sauvages
A qui je dédis le roux de ma chevelure
Et le lapis-lazuli dérobé à vos rivages
Oubliées les conversations que je n’ai pu tenir !
Delphyne ne s’exprime jamais aussi bien
Que lorsque ses maîtres lui tendent la main
Pour écrire le saphir de ses beaux souvenirs.
Mon cher Pierre-Yves, ma chère Claudine
Ma chère Danielle, mon cher Henri
Mon cher Max, ma chère Justine
Mon âme, hier, figuier de Barbarie,
Clame : mille mercis de ce cadeau génial !
Quel plaisir de poser enfin toutes ses valises
De chasser les mauvaises augures au canal !
La Corse, devenue l’infirmière, me cicatrise !
Jamais je n’oublierai le verre penché
Dans lequel le papillon est venu boire
Comme le signe magique d’une soif étanchée
D’une amitié naissante qu’il me plait de faire valoir !
Jamais non plus, si comparaison possible,
Je n’oublierai la main serrée de votre fille
Ses paroles auxquelles je fus ultra sensible ;
En dépit de mes silences, mes mots brillent.
Pas de vacarme, peu de pêcheurs et touristes
Juste le calme somptueux, une joyeuse entorse
Les fromages, la lonza, les coquets paysagistes
Ce bout de France qu’on nomme la Corse…
Par ces quelques mots assemblés, je respire :
Voici un peu de moi, ma prompte récompense
Depuis le jour béni de ma première naissance
Voici une semaine dont il faudra me souvenir.
D’éperons rocheux en plages paradisiaques,
De genévriers thurifères aux jaunes genêts
Des pavillons de complaisance au simple zodiac
Qu’il me fût agréable, chez vous, de déjeuner !
Sainte Lucie de Porto-Vecchio, grâce !
Je te rends hommage ! Adieu mélancolie !
Limpide, mon regard vert, se repasse
Le bonheur d’Etre, avec lequel je me réconcilie.
Tel le Panicaut des mers ou les cistes roses
Je me suis attachée à vos farouches dunes
Et fixe les dentelles de Bavella, une à une,
Au plus profond d’un Moi qui se métamorphose.
En cette année de fête d’U Babbu di a Patria (*)
Vous m’avez donné l’occasion de réécrire
Mon propre littoral qui n’avait rien de Palombaggia
Mais qui depuis semble lentement se reconstruire.
Je vous exprime, s’il fut besoin de conclure,
Ma plus sincère gratitude, ma bienveillance
De m’avoir permis ses somptueuses vacances
Mon micro paradis balnéaire a pris jolie tournure…
Delphyne, juillet 2007.
(*) Pasquale PAOLI : le Père de la Patrie